arrow-left
image-news
Clément Daniou -  09/04/2020

Reine du 3x3


Impériale en 2019 avec l’Équipe de France 3x3, Laëtitia Guapo est aujourd’hui la meilleure joueuse mondiale selon le ranking FIBA. Alors qu’elle devait prendre part au TQO à Bangalore (Inde), la situation sanitaire due à l’épidémie de coronavirus la contraint à patienter.

Le 7 décembre dernier Brisco, Youtubeur et influenceur partageait sur le célèbre réseau social une vidéo de 15 minutes le mettant en scène face à Laëtitia Guapo, joueuse de Charnay en LFB et numéro 1 mondiale au ranking FIBA 3x3. Avec plus de 200.000 vues, la vidéo est vite devenue virale dans la planète basket, engendrant de nombreuses réactions. "Je ne savais pas qu'on avait une telle équipe féminine en 3x3. Merci pour la découverte", notait ainsi un internaute. Cette soudaine exposition a permis à la joueuse de se faire un nom auprès d’un public peu habitué à être informé des dernières actualités du basket féminin 3x3. Déterminée à faire parler d’elle et par la même occasion de la pratique qu’elle affectionne tant, la joueuse de 24 ans n’a pas hésité avant de saisir cette opportunité. "J’ai envie d’aider à démocratiser le 3x3. L’expérience avec Brisco a été géniale, je trouvais qu’on avait tous les deux des choses à y gagner. Si je peux inciter d’autres personnes à le faire, ce serait bénéfique pour le 3x3. Dans les commentaires, certaines personnes disaient ne pas savoir que l’Équipe de France 3x3 évoluait à un tel niveau. J’étais un peu étonnée même si quand j’en parle dans un covoiturage par exemple, c’est une tendance qui se confirme. C’est un phénomène qui sera de l’histoire ancienne si on se qualifie pour les Jeux Olympiques de Tokyo."

Un cardio hors normes

Fin 2016, les Équipes de France universitaires féminines et masculines réalisaient un splendide doublé lors des Championnats du Monde en Chine. En inscrivant un shoot bonifié plein de sang-froid en prolongation, l’étudiante en STAPS à l’université Jean Monnet de Saint-Étienne offrait le titre suprême à son pays. Avec Caroline Hériaud, son actuelle coéquipière, elle formait un duo explosif entre adresse et qualités athlétiques. Cette performance a tout de suite interpellé le sélectionneur Richard Billant, qui ne tardait pas à inviter Laëtitia Guapo à Voiron en juin 2017 afin de disputer un tournoi international. "J’avais fait bonne impression, ça s’était très bien passé mais il avait déjà son équipe donc il m’a dit qu’il me rappellerait." Chose promise, chose due. Quelques mois plus tard, Laëtitia Guapo est contactée par Karim Souchu, entraîneur des Équipes de France et désireux de la faire venir pour la finale du Nations League U23. Son profil l’a tout de suite interpellé. "C’est une joueuse à part parce qu’elle a un gros volume de jeu. Elle défend, elle attaque et physiquement elle est vraiment impressionnante. Je prends toujours en référence le fait qu’elle court le 10.000 mètres en 35 minutes. C’est exceptionnel pour une basketteuse. Son cardio c’est un des gros avantages qu’elle a, en plus d’être agressive. Elle a une grosse marge de progression et son profil est vraiment fait pour le 3x3", juge-t-il. Ayant l’obligation de passer son concours d’EPS au même moment, Guapo est contraint de refuser cette proposition.
Ce n’est finalement qu’en 2019 qu’elle va se mettre à disposition de l’Équipe de France 3x3. L’attente aura été longue mais le résultat en valait la peine. Auréolée de deux médailles internationales et vainqueure des Women’s Series, elle est devenue par la même occasion numéro 1 mondiale au ranking FIBA, devançant ses deux coéquipières Migna Touré et Ana Maria Filip. Ces divers sacres ont étendu la domination sans partage des Françaises sur la scène mondiale mais n’ont paradoxalement pas suffit à les qualifier d’office pour les Jeux Olympiques de Tokyo. Un comble quand des nations comme la Roumanie ou la Mongolie voyaient leurs noms cités lors de la cérémonie d’annonce le 1er novembre dernier. Un passage par le tournoi de qualification olympique oblige donc les Françaises à patienter avant de connaître leur sort. "On a tout fait pour essayer de se qualifier directement mais le destin en a décidé autrement. L’objectif reste le même. On était toutes déçues mais on y arrivera par tous les moyens."

Un impact en LFB

Comme d’autres joueuses, ce succès quasi immédiat dans le 3x3 a permis à la carrière de Laëtitia Guapo de prendre un tournant positif. Contrainte de descendre chercher du temps de jeu en LF2 à Roanne puis Reims après deux saisons en bout de banc à Nice, l’actuelle joueuse de Charnay a conscience que cette réussite a permis de lui donner un nouvel élan. "Les très bons résultats permettent d’être mis en avant mais ça m’a surtout aidé à reprendre confiance en moi. Je savais que j’avais des qualités athlétiques mais je me suis rendu compte que je pouvais faire plein d’autres choses sur un terrain." Meilleure scoreuse de son équipe en LFB après 17 journées grâce à ses 12,5 points de moyenne, auxquels s’ajoutent 6 rebonds et 4 passes décisives, Guapo se classe légitimement comme l’une des meilleures joueuses françaises de la division. Sa renommée récente profite même à cette petite commune de 8.000 habitants située en Saône-et-Loire, le Président du club n’hésitant pas à lui afficher son soutien. "C’est une grosse plus-value pour le club", indique-t-elle. "Personne ne connaît Charnay mais pourtant on est en LFB. Même si je dois m’absenter parfois, je sais que mes dirigeants me suivent et sont contents pour moi."
Amenée à revêtir le maillot bleu avec l’Équipe de France 3x3 en pleine saison 5x5, le calendrier de Laëtitia Guapo peut vite devenir surchargé. Cette double casquette ne doit donc pas avoir d’impact sur ses performances et sur sa régularité. "J’ai même été obligée de faire un deal avec mon coach Matthieu Chauvet", sourit-elle. "Pendant le stage avec l’Équipe de France 3x3 à l’INSEP, il m’a envoyé un message et il était un peu énervé. Je manquais à l’appel et c’était aussi le cas de Promise Amukamara qui disputait le TQO 5x5 avec le Nigéria. Il ne pouvait pas faire de jeu tout terrain parce qu’elles n’étaient que huit." Un problème commun à tous les clubs de LFB qui n’empêche pas les joueuses de prendre part aux différentes compétitions. Laëtitia Guapo ne déroge pas à la règle, ayant comme tous sportifs et sportives le rêve de participer aux Jeux Olympiques. Pour Karim Souchu pas de doute, elle s’inscrit même dans la durée. "C’est une des joueuses sur lesquelles on va compter. De nombreuses échéances se profilent dans les mois et années à venir avec les Jeux Olympiques de Tokyo, le Championnat d’Europe en 2021 et Paris 2024. Elle sera à coup sûr une de nos têtes d’affiche." Qu’importe la pratique, l’avenir s’annonce radieux pour Laëtitia Guapo.